Chambonas en Ardèche (Auvergne-Rhône-Alpes)

Le château de Chambonas en Ardèche (Auvergne-Rhône-Alpes). Chemins de randonnées: GR de Pays Le Cévenol et GR®4.

Blason du château de Chambonas en Ardèche

Le château de Chambonas

Le château de Chambonas 1Le château de Chambonas fut sans doute fondé dans son état actuel par Henri de la Garde, qui vivait au début du XVIIème siècle. Il appartiendrait donc à la vague de construction qui toucha le pays après les premières guerres religieuses, comme Joviac et tant d'autres. Henri de la Garde acquit diverses seigneuries de la famille de Borne. Il fut aussi un adversaire acharné des huguenots pendant les guerres du règne de Louis XIII. Le soldat du Vivarais raconte dans ses Commentaires que la ville des Vans avait suivi la rébellion de Privas, ce qui avait obligé M. de Chambonas à tonifier son château proche d'une demi-lieue, et notamment d'une forte garnison qu'il y tenait. Quoique des Vans il sortit ordinairement quatre ou cinq cents hommes de guerre, tant des habitants que de quelques compagnies qu'ils y entretenaient, ils étaient si bien resserrés par M. de Chambonas qu'ils avaient là assez d'occupations sans en prendre ailleurs... Il leur prit le Chabiscol, maison fortifiée pour la commodité de leur moulin, qui les incommoda grandement: il leur tua grand nombre de leurs meilleurs soldats, et toutes les saisons leur faisait un grand dégât à leurs vignes.

Le château de Chambonas 2Au mois de septembre, il avait convié M. de Vernon pour l'assister à vendanger; de leur côté ils s'y préparèrent aussi et au bout du compte il y eut de si bonnes escarmouches que plusieurs de part et d'autre y furent vendangés eux-mêmes... En 1628, on le retrouva encore aux côtés de Guillaume de Balazuc dans la guerre contre le duc de Rohan. C'est en 1630 que le pont de Chambonas fut remis en service. et d'après Jacques Schnetzler, il aurait toujours résisté depuis.

Antoine de la Garde, fils d'Henri, parvint à acquérir la seigneurie de Chambonas, toujours de la famille de Borne. Il acheta aussi parmi d'autres, la seigneurie de Sablières le 4 mars 1638, de Jacques du Roure, qui la tenait lui-même du sieur de Sablières, Jean de Bourguinhon. Elle lui coûta 1156 livres 19 sols, et comprenait 40 tenanciers, qui lui versaient de l'avoine, du seigle, du vin, des châtaignes fraiches, des pains, des poules, de la cire d'abeille, et un peu d'argent.

Louis-François, fils d'Antoine, épousa, le 19 août 1629, Charlotte de la Baume de Suze, soeur de l'évêque de Viviers. Ils eurent deux fils, dont l'ainé, autre Louis-François, prit en 1683 le titre de marquis grâce à des lettres patentes de Louis XIV, et dont l'autre, Charles-Antoine, né en 1735, fut longtemps gland vicaire de son oncle Monseigneur de Suze, puis évêque de Lodève, coadjuteur puis évêque de Viviers (1600- 1713). La famille était déjà devenue l'une des princpales du pays.

L'apogée de la famille de Chambonas C'est en qualité de coadjuteur que Charles-Antoine de Chambonas rédigea en 1684 en faveur des habitants de Privas, huguenots, pour demander au roi "de les laisser se relever de l'état pitoyable où ils sont réduits, principalement pour avoir moyen d'employer leurs biens et leurs vies pour Sa Majesté". À cette époque de persécution, et alors que les Privadois avaient été chassés pour la seconde fois de leur ville en 1664, cette attitude d'un membre du haut clergé vaut la peine d'être soulignée. On dit qu'à l'époque des "petits prophètes", il allait de paroisse en paroisse, obtenant la grâce de beaucoup de paysans. Damville dit de lui que "ce prélat, avant ces désordres, avait travaillé efficacement pour la religion dans ce pays, la place du vieil évêque, son oncle, qui à cause de son grand âge, était incapable d'agir".

Louis-François, premier marquis de Chambonas, écrivait en 1672: "J'ai mon château à quatre tours, fermé de murailles, granges, basse-cour, écuries et pigeonnier" ce qui laisse penser que le château avait son aspect actuel, pour l'essentiel, dès cette époque. Louis-François mourut sans postérité en 1710. Un autre de ses frères, Henri-Joseph, lui succéda Henri-Joseph avait épousé en 1685 Charlotte de Fontanges, dame d'honneur de la duchesse du Maine. Celle-ci fut impliquée un moment dans la conspiration de Cellamare, en décembre 1718. et la marquise de Chambonas demanda l'honneur de partager quelques jours sa prison.

Le château de Chambonas 3Ce fut sais doute Henri-Joseph qui fit réaliser les célèbres jardins de Chambonas donc entre 1710 et 1729. Il est certain que Le Nôtre, célèbre jardinier de Louis XIV, n'en dirigea pas la réalisation puisqu'il mourut en 1700. Par contre, l'abbé Charay, en classant les ouvrages de la bibliothèque, a retrouvé une Théorie et Pratique du Jardinage attribuée à Leblond, élève de Le Nôtre, qui, d'après une note anonyme, aurait tracé les jardins de Versailles, des Tuileries et de Chambonas. La réalisation fut peut-être très postérieure au dessin "Rien n'est sûr, mais tout est vraisemblable", conclut donc prudemment le savant abbé.

Henri-Joseph mourut en 1729, et son successeur fut son fils Scipion-Louis-Joseph. qui épousa d'abord Claire-Marie, princesse de Ligne, le 19 mars 1722, puis devenu veuf, Marie de Grimoard de Beauvoir du Roure, de la puissante famille des Roure, qui avait acquis au XVIIème siècle la seigneurie des Vans. Scipion-Louis-Joseph de Chambonas fut avant tout un militaire, qui quitta la carrière en 1746. parce qu'il n'avait pas réussi à obtenir le bâton de maréchal de France. Albin Mazon lui attribue la paternité des fameux jardins, entre 1737 et 1742.

Le château de Chambonas 4Il mourut en 1765, laissant de son second mariage un jeune fils, Victor-Louis-Scipion, qui fut le dernier marquis de Chambonas. D'après Mazon, ce jeune homme épousa une fille naturelle du ministre de la Guerre, le marquis de Saint-Florentin. Il s'en sépara avec éclat, et le procès alimenta les chroniques de l'époque. Bien qu'elle fût jolie comme un ange. Merle de Lagorce, dans ses Mémoires d'un homme de cour, que cite Mazon, dit qu'il ne s'en occupait guère, préférant la faire peindre en singe, en ours, en ermite, en mendiant, en abbé, en religieuse, en paysanne, etc., sur les panneaux de son salon. Lui-même aimait à se travestir en récollet; il avait fondé avec son ami le duc de Bouillon un ordre de la Félicité. Tous deux en étaient grands maîtres alternativement, et les personnes admises portaient sur le coeur un ruban vert, symbole de l'espérance. Les statuts contenaient les maximes de la galanterie la plus raffinée dit Merle de Lagorce. Cette discrétion nous prive sans doute de détails croustillants, mais le mémorialiste explique que son château ne désemplissait pas d'étrangers, c'était plutôt leur habitation que la sienne. Après la révolte des Masques Armés (1783), les quatre conseillers envoyés sur place par le Parlement de Toulouse furent hébergés au château de Chambonas.

Le marquis de Chambonas accepta avec enthousiasme les idées de la Révolution, à la suite de La Fayette. Il devint maréchal de camp dans les troupes de la Seine en avril 1792, puis, à la démission du ministère girondin le 13 juin, ministre des Affaires étrangères de Louis XVI, poussé par Duport, l'un des chefs du parti feuillant. Son ministère dura à peine un mois, de juin à juillet 1792; il chercha dans la mesure du possible à briser l'alliance entre Vienne et Berlin, et surtout à suspendre les hostilités. Le chef girondin Brissot l'accusa de trahison le 8 juillet, pour ne pas avoir signalé l'avance des Prussiens. On lui reprochait aussi d'avoir fait du trafic d'armes avec Beaumarchais. Il répondit paisiblement qu'il n'était pas informé, et ce fut quelques jours plus tant que l'Assemblée législative proclama la Patrie en danger. Il expédia les affaires courantes jusqu'au 23 juillet, puis s'éclipsa discrètement vers l'Angleterre.

Le château de Chambonas 5Il y trouva la sécurité, mais non la fortune, car il y emprunta autant qu'il le put, jusqu'a être traduit en 1805 devant les tribunaux anglais. Il fut condamné à une lourde amende et à la prison. Il fut rayé de la liste des émigrés dès le 26 thermidor an III, mais il ne semble pas être revenu pour autant en France. On pense qu'il mourut dans la misère à Londres en 1807, et son fils Alphonse de la Garde, contrôleur principal des Droits réunis à Ambert, dans le Puy-de-Dôme, se hâta de vendre le château le 13 février 1808 à Charles-François de Chanaleilles, ancien chevalier de l'ordre de Malte, directeur général des Domaines à la Martinique, devant M. Postelle, notaire à Paris.

"Le château est sans contredit l'habitation seigneuriale la plus heureusement et la plus grandement disposée que nous ayons dans notre ancienne province. Il s'avance en saillie sur le premier plan d'un tableau, dont les riantes contrées qui enveloppent et enserrent de toutes parts le village de Chambonas forment la bordure. Éloignez les maisons qui le pressent et l'étreignent sur un point, semez l'air et l'espace autour de lui, donnez à son joli jardin paysager les proportions grandioses d'un de ces immenses parcs dont sont pourvus les lords de l'aristocratie anglaise, et vous aurez une de ces demeures privilégiées aux-quelles la nature et la main de l'homme n'ont plus rien à ajouter."
Ovide de Valgorge écrivait cela en 1846, et il faut reconnaitre qu'un siècle et demi plus tard, on n'a pas grand-chose à ajouter, sinon que les jardins anglais n'ont rien à voir avec ceux de Chambonas... Sur un plan conservé au château, et datant sans doute de 1808, date de l'achat par Charles de Chanaleilles, on voit des terrasses régulièrement plantées d'arbres, sans doute de mûriers, et des parterres de gazon triangulaires dont certains persistent encore de nos jours. Le château et le parc furent bâtis dans l'axe du pont, donnant ainsi une magnifique perspective, mais la grille monumentale proche du Chassezac ne sert jamais.

On pénètre à présent dans le domaine par l'est, et on aperçoit tout de suite le puissant escarpement de grès sur lequel le château fut construit. Vers le nord-est, un bâtiment annexe, aussi élevé que le château, date sans doute du XVIIIème siècle, et se raccorde au bâtiment principal par un escalier à vis. L'angle nord-ouest du château remonterait au Moyen Âge, mais le reste de la bâtisse date sans doute pour l'essentiel du XVIIème siècle.

On parvient à la terrasse supérieure par un escalier à double révolution encadrant un bassin. Elle est ombragée par quatre platanes vénérables, dont les puissantes racines affleurent ici et là sur le sol. De grands vases vernissés, oeuvre de potiers d'Anduze du début du XIXème siècle, sont toujours présents sur la gauche. Devant soi, on découvre la fontaine monumentale, dont l'eau s'écoule ensuite à l'aide de tout un jeu de vasques et de bassins, à travers le jardin. Au-dessus de la fontaine, un cippe funéraire domine encore ce qui dut être un ancien bassin. Il parait qu'on a trouvé autrefois de nombreux cippes autour de Chambonas et qu'ils ont disparu, perte due soit à la négligence soit à la rapacité. La carte archéologique de la Gaule n'en fait aucune mention.

Le château de Chambonas 6La façade principale est orientée vers le sud, vers le jardin et les fontaines. Elle est encadrée par deux tours rondes, à deux étages séparés par des bandeaux, comme elle. Celle de l'ouest est chapeautée de tuiles bistre, celle de l'est est couverte d'ardoises comme les trois autres. Au-dessus du portail, il y a des échauguettes encadrant une horloge, reposant sur de jolis culs-de-lampe. Il s'agit sans doute d'un rajout du XIXème siècle. Le portail monumental, encadré par un triple bossage et dominé par un arc en anse de panier portant le blason des Chanaleilles, est l'un des plus remarquables de la région. La parenté avec la porte au sud-ouest du château d'Aubenas est évidente. Deux torches en ferronnerie, récentes mais de très bon goût, complètent l'ensemble.

On entre ensuite dans un immense vestibule se trouvant sur l'emplacement d'une ancienne cour intérieure, dans lequel s'élève un magnifique escalier monumental, avec de vigoureux balustres. probablement le plus beau que le XVIIème siècle nous ait laissé. Le mobilier a beaucoup changé depuis la visite que l'abbé Charay a faite et décrite en 1966: il y a toujours deux armures, dont l'une au moins semble d'époque. Les tapisseries ont disparu, mais demeure la magnifique lanterne vénitienne qui éclaire les lieux. Une statue d'Étienne Marcel, indatable, surveille le visiteur d'un air énigmatique.

Sur la gauche, on trouve la salle des gardes, voûtée d'arêtes, aménagée au XVIème siècle, et qui est un ancien tinel, ou salle à manger. On y remarque surtout une très belle cheminée avec un arc en anse de panier, accolée de deux alvéoles; dans celle de gauche, on aperçoit un chauffoir pour les plats, fermé par un portillon de pierre. La plaque de cheminée porte deux bombardes, ce qui évoque parait-il la fonction honorifique de maître de camp du marquis Scipion de la Garde, qui occupa le château au milieu du XVIIIème siècle.

Le château de Chambonas 7Sur la droite, on pénètre dans un salon à l'italienne, couvert de voûtes d'arêtes. Le décor mural a été peint à la détrempe, comme dans le grand salon de l'évêché de Viviers. Quand on sait qu'un membre de la famille de Chambonas fut évèque de Viviers quelques décennies avant la construction du palais épiscopal, et que celui-ci fut en partie financé par de l'argent provenant des Chambonas, on peut évidemment penser que les artistes appartenaient au même groupe. Chaque mur est consacré à un des quatre él éments : le feu symbolisé par une salamandre et un pot à feu est représenté vers la cheminée; la terre pourvue d'un éléphant, d'un dromadaire, d'un cheval et d'un lion se trouve sur la droite. L'air, en face, est figuré avec ses oiseaux, l'eau enfin est symbolisée, à gauche, par des fontaines, des coquillages et le trident de Neptune. Au plafond apparaissent la Musique, les Arts et les Sciences, la Chasse et l'Agriculture, le tout dans un décor floral luxuriant et coloré. Les meubles Louis XV vus par l'abbé Charay ont hélas disparu.

À la base de la tour du sud-est se trouve la petite chapelle, voûtée aussi, peinte en bleu avec des étoiles d'or dans le style du XIXème siècle. L'autel semble plus ancien. peut-être du XVIIème; en face, il y a les armes des Chanaleilles (encore) et surtout, en dessous, un magnifique portrait du Christ en bas-relief. L'abbé Charay attribuait cet ouvrage au célèbre orfèvre et sculpteur de la Renaissance, Benvenuto Cellini (1500-1571). Bien sûr, la prudence s'impose : cependant, même s'il ne s'agit que d'une copie, la finesse des traits, la noblesse et la douceur du visage méritent incontestablement l'attention la plus active.

Le château de Chambonas 8La pièce suivante, aménagée en salle de billard, voûtée d'arêtes aussi, communique avec le salon à l'italienne par un magnifique portail du XVIIème, et toute une décoration florale d'époque Louis XV. La base de la tour du nord-est est aménagée en salon, du même style. Le carrelage vernissé de ces deux pièces, datant du XVIIème siècle, est une pure splendeur. Plus loin, il y a encore une pièce, couverte par des poutres coffrées, où on peut admirer un moment un superbe poêle en faïence et un cadre de miroir dont l'élégance et la grâce évoquent toute la civilisation des Lumières.

Les tableaux décrits par l'abbé Charay en 1966 ont disparu. Les étages étant actuellement occupés par des appartements, nous n'avons pas pu voir la "chambre rouge", ou "chambre de l'évêque", dont il parle, ni les "fabriques" à l'italienne peintes sur toile et encadrées de rocailles et de fleurs polychromes. Les nombreux tableaux qu'il décrit ont probablement disparu. Quant aux archives. elles se trouvent désormais aux Archives départementales de Privas.

Il est bon de savoir que les façades et les toitures du château de Chambonas sont inscrites à l'Inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis l'arrêté du 2 avril 1963. L'ensemble du parc, le grand escalier, le salon à l'italienne, le grand salon qui lui fait suite ainsi que le petit salon de la tour nord-est, sont classés monuments historiques.

Le château de Chambonas est une propriété strictement privée. Cependant, à certaines occasions, le public peut accéder aux jardins. Les sociétés savantes locales sont parfois reçues dans les pièces que nous avons décrites. Dans tous les cas, il est bien sûr indispensable de respecter l'intimité des habitants. Ardèche, terre de châteaux. Par Michel Riou. Publié par La Fontaine de Siloé.

 

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